mardi 30 septembre 2014

Dans un nuage de poussière...

Je reviens de quelques courses à l'épicerie. Habillée en jogging, je ne sais pas encore ce qui m'attend à la maison. Sur ma tête, un voyage de foin qu'on peut aussi appeler mes cheveux.

Et tourne la clef dans la serrure...

C'est dans un nuage de poussière qu'il se montre le bout du nez, le menuisier. Les épaules larges comme une armoire à glace, le teint basané, les cheveux rasés, d'où sort cet Apollon ma foi du bon Dieu?!

Il avance au ralenti comme dans les films de cowboys, son équerre à la main. Vers moi, voyons, il avance vers moi.

- Madame Gagnon je suppose?

Merde j'ai l'air si vieille que ça, madame Gagnon. Come on. Appelle-moi babe. (Je dis n'importe quoi).

- Oui, c'est moi, bonjour.

- Votre propriétaire vous a sûrement avisé que j'allais passé pour quelques ajustements à votre escalier?

- Hummmm oui oui (NON)!

Il porte un ti-shirt trop court, noir. Il n'aurait qu'à se lever les bras dans les airs que j'y verrais le six packs bien ciselé. Ses avant-bras sont incassables, j'en suis certaine. Ils sont bigarrés de quelques tatous, pas trop tsé juste assez. Ses veines me regardent l'air de dire : ces bras-là sont trop forts, on ne peut plus respirer.

Il porte des bottes à cap. Oui, des bottes à cap noires légèrement usées, juste pour dire que ça lui donne un look bum rien qu'un peu. Les bottes à cap, pour moi = la même chose qu'une cravate pour une autre fille.

- Il n'aurait pas pu m'envoyer un laidron franchement, moi qui fait dure ces temps-ci avec ma tête de déterrée insomniaque.

- Il fait beau aujourd'hui, me lance-t'il un clou entre les dents.

- Oh que ouiiiiiiiiiiiiiiiiiiii, m'exclamais-je avec un élan un peu trop expressif.

(Pourquoi je sifflote sur un ton chanté tout d'un coup. Sainte!!!!)

Est-ce que je lui demande s'il veut boire quelque chose? Ça va peut-être avoir l'air weird mon affaire, genre la nouvelle maman qui veut jaser de sa vie de famille. Non, je ne lui offre rien. Oui mais il va peut-être penser que je suis une radine si je ne lui offre rien. Grrrr

- Prendriez-vous quelque chose à boire? Eau, jus, café, un coke?

- Volontiers pour un bon café noir.

Il est tough en plus, du café noir. ARK. Pas capable de boire ça.

J'ai l'air d'être sortie tout droit de la 3e guerre mondiale avec ma chevelure frivole. Il va penser quoi, que je me néglige. (Je cours à la salle de bain me mettre du gloss couleur NUDE. Comme ça il va croire que naturellement j'ai les lèvres étincelantes et charnues.)

- J'ai annulé le coiffeur pour votre venue aujourd'hui. (MERDE quossé que je viens de dire là, ostie de folle).

- Ahhh! qu'il me répondit.

(Seigneur, on dirait une fille qui n'a jamais parlé à un menuisier charmant. Ben je n'ai jamais eu à parler à un menuisier charmant).

Quelques sueurs l'abîment. J'imagine qu'il a chaud. Je devrais peut-être ouvrir la clim, me vêtir d'une robe blanche à la Marilyn et me faire éventer la jupette? (Je suis vraiment épaisse).

- Vous êtes nouvellement maman?

- Pourquoi pensez-vous ça? (Eilleeee eeeeee, c'est pas parce que j'ai 5 kilos en trop, du melasma dans le front que je suis nouvellement maman.)

- La tonne de jouets dans l'entrée. Un petit garçon, fille?

- GARÇON!!!!!!!

Il vient de perdre des points celui-là, me semble qu'il a vu ça au nombre de jouets. Je dois vraiment avoir l'air d'une maman sur le BS présentement, surtout avec mon linge mou.

- Je vais m'habiller. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, demandez! (Franchement, ça fait vraiment aguicheuse mon affaire).

- Merci!

Habillée un peu plus funky, je regarde l'Adonis manier ses instruments, il a l'air de savoir ce qu'il fait. Quel âge il a, celui-là? Je pourrais sûrement être sa tante. Arrrggggg.

Après avoir tourbillonné en rond dans l'appartement toute la journée à regarder le jeune menuisier sexy qui répare mon escalier, je suis épuisée. J'ai le cerveau à off. Je pense que ça fait trop longtemps que je ne suis pas sortie de mon nid. Un détail me sort de ma rêverie, j'ai complètement oublié de lui servir son café noir.

- Je viens de réaliser que j'ai oublié de vous servir votre café, je suis désolée.

- Ohhhhh c'est pas grave, j'avais de l'eau avec moi.

- Vous en voulez un, pour finir la journée sur le HIGH? (Sacrâment, je dis vraiment n'importe quoi quand je suis gênée!)

- Non non, merci, ça va aller. J'ai terminé. Je rentre. Merci madame Gagnon, je vais passer voir votre propriétaire.

Et c'est sur ces belles paroles qu'il me lance un clin d'oeil au charme fou!

Nonnnnnnnn, je suis rouge comme une tomate, merde!

J'ai fait mauvaise impression. Un beau gars en jeans troué, bottes à cap aux pieds qui rentre chez-lui et qui me laisse l'air béat. Sa mâchoire était aussi carré que Michael Fassbender. Des trapèzes certainement aussi durs que le bois de l'escalier. Je me demande quel âge il me donne? 25-32-35-40-50? Si c'est 50, je dois désespérément passer sous le bistouri ou aller me faire pomper le front au botox.

Finalement, le soir venu, je regarde mon amoureux sur le divan. Il n'a peut-être pas les trapèzes du menuisier, mais il a une mâchoire à faire fondre Mila Kunis. Je suis la Mila Kunis de mon chum bon. Et je le trouve tellement beau... avec ses pantoufles à cap. :)

Je me trouve un peu nunuche d'avoir été aussi énervée devant le bel ouvrier. Je constate que lorsqu'on devient maman, plusieurs femmes comme moi perdent quelque peu l'estime d'elles-mêmes et je trouve ça désolant. Et pourtant. À en perdre nos moyens, se demander si un gars peut encore nous trouver belles et attirantes. C'est une autre forme de beauté, celle de la maturité, du vécu, d'un corps qui a donné la vie et qui travaille très fort chaque jour pour nourrir, divertir, aimer, réconforter un petit être.

Bref, un peu plus je faisais une crise de coeur lorsque David est parti en me lançant le clin d'oeil. Oui oui, David. Comme dans David Beckham. C'est grand temps que je reprenne confiance en moi. C'est tout de même pas désagréable être à la maison quand un bellâtre se présente pour un job de bras :) Ça a fait ma journée. Du beau grand soleil dans mon escalier.











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